Quatre formes du pouvoir (selon Starhawk)
Quatre formes du pouvoir (selon Starhawk)
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Dans Comment s’organiser, manuel pour l’action collective, Starhawk distingue quatre formes de pouvoir: le pouvoir-sur, le pouvoir-du-dedans, le pouvoir-collectif et le pouvoir-avec.
Dans l'ouvrage "Comment s’organiser, manuel pour l’action collective", Starhawk distingue quatre formes de pouvoir:
Le pouvoir-sur : “le pouvoir coercitif est une forme de pouvoir qui nous est familière à toutes dans le cadre des hiérarchies. C’est le pouvoir qu’une personne exerce sur une autre, ou qu’un groupe exerce sur un autre, pour contrôler les ressources, pour imposer des sanctions et des punitions, pour engager ou licencier. En dernière instance, il est adossé au pouvoir de l'État, de la loi, et à la menace sous-jacente de la force.” Exemple: une patronne et son employée, ou la police et des citoyennes.
Le pouvoir-du-dedans : “le pouvoir-du-dedans est un pouvoir créatif (...). Ce pouvoir qu’on se donne peut s’incarner dans le courage moral – le pouvoir que nous ressentons lorsque nous énonçons une vérité dérangeante ou lorsque nous nous battons pour une valeur en laquelle nous croyons (...).”. Exemple: une personne qui ose dénoncer une situation d'oppression raciale dont elle est témoin.
C’est à partir du pouvoir du dedans que Starhawk constate qu’on peut développer:Le pouvoir collectif, “(...) le pouvoir qui est propre au groupe lorsque nous agissons ensemble. On peut également utiliser ici le terme de solidarité, emprunté aux valeurs de la bonne vieille tradition syndicale”. Exemple: les gilets jaunes, ou une association de voisines qui mettent en place un réseau d'entraide. C’est dans cette forme de pouvoir que se situe l’idée de pouvoir compter sur l’autre, en dépit des désaccords affectifs ou les intérêts personnels divergents.
Le pouvoir-avec, qui découle des privilèges sociaux et familiaux, ainsi que de la renommée, mais qui est utilisé en conscience : “(...) on pourrait aussi parler d’influence, de rang de pouvoir symbolique ou d'autorité. Cette forme de pouvoir détermine l’intensité de l’écoute qui vous est accordée dans le groupe, le poids qu'ont vos opinions et le respect que vous inspirez”. Exemple: une réalisatrice oscarisée qui utilise sa voix pour dénoncer un génocide, ou une juriste qui travaille bénévolement pour des sans-papiers. Le pouvoir-avec ne réside pas dans les privilèges en soi, mais dans les outils qu’il permet de mobiliser (ce que Bourdieu appelle le capital social).
Ce qui est lumineux dans cette pensée, ce sont à notre avis les deux choses suivantes :
“Les groupes collaboratifs s'efforcent souvent d’éliminer le pouvoir-sur et les privilèges. Mais lorsqu’ils confondent pouvoir social [c’est-à-dire le pouvoir du-dedans, le pouvoir collectif et le pouvoir-avec] et pouvoir coercitif, ou se révèlent incapables de distinguer la part du pouvoir social dûment acquise de celle qui ne l’est pas, ils risquent d’entraver la dynamique d'empouvoirement de leurs membres.
Si un groupe ne reconnaît pas pleinement le pouvoir social acquis et ne définit pas de quelle manière ce pouvoir peut être gagné et exercé, il va finir par pénaliser et rejeter ses membres les plus solides et les plus investi.e.s. Ces groupes seront peut-être égalitaires – mais ils seront extrêmement inéquitables.”
Et encore: “Nous devons distinguer clairement quelles formes de pouvoir sont dûment acquises ou pas. Nous devons trouver des façons d’identifier et de limiter ce qui relève du privilège, tout en encourageant les manières positives de gagner du pouvoir, du respect, et de recevoir de justes rétributions."
Autrement dit: il y a des formes de pouvoir possiblement positives, si elles sont utilisées de façon conscientisée au sein du groupe.
in "Comment s’organiser, manuel pour l’action collective", Starhawk, Editions Kambourakis, 2021, pp. 70-71.